Trois haïkus d'hiver / Yosa BUSON
Hiver désolé –
noir de corbeau
neige d’aigrette
Plus émouvantes encore
à la lumière des lanternes
les prières des nuits froides
Un oiseau crie –
le bruit de l’eau noircit
autour de la nasse
Yosa Buson
1716-1783
En passe de devenir ici un gadget littéraire à la mode, le haïku est à l’origine un des fondements de la poésie japonaise. Petite touche impressionniste, il évoque en trois vers et 17 syllabes (5/7/5) un sentiment fugace, une impression volatile, un sentiment profond… Parfois grinçant d’humour, il ne rechigne pas à la moquerie légère, mais aussi à l’évocation du désespoir.
A l’époque impériale, le haïkaï (au singulier) signifie « poème libre » c’est à dire échappant à la surveillance des autorités. Il est le premier maillon d’un jeu littéraire à plusieurs, où chacun ajoute son couplet, dans un contexte de philosophie bouddhique zen des moines guerriers. Souvent attaché à une saison, il évoque le temps qui passe et les métamorphoses de l’âme. Il joue aussi avec la métaphore basée sur les symboles de la nature. Au Japon, sa forme plastique est aussi un élément important car les idéogrammes se répondent dans leur forme, de même que leur sonorité équivaut à nos rimes.
Le haïku compte parmi ses maîtres de célèbres auteurs depuis le 17e siècle, comme Bashô (1644-1694) et beaucoup d’autres tels Buson (1716-1783), Shiki (1867-1902). Objet d’un succès international, il est pratiqué au Japon comme l’ikebana (l’art du bouquet), tel un loisir philosophique. Poèmes choisis par CATHERINE.